Que dire sur le peintre Torrentius et son tableau Nature morte avec bride ?
Question d'origine :
Je suis fascinée par la Nature morte avec bride, de Torrentius, 1614
On y voit une partition. Quelle est la mélodie, et les paroles ?
Que sait-on de ce peintre controversé ? Prêchait-il le satanisme ? A-t-il influencé réellement Jeronimus Cornelisz, le tyran des rescapés du Batavia ?
Réponse du Guichet
Jan Simonsz Torrentius dit Jan van der Bbeck est né en 1589 à Amsterdam et décédé en 1644 des suites des tortures qui lui furent infligées. Cet artiste, intriguant et dont les oeuvres demeurent méconnues a fait l'objet de nombreuses études.
Bonjour,
Commençons par présenter une courte biographie de Jan Simonsz Torrentius, dit van der Beeck, né en 1589 à Amsterdam et mort dans cette même ville en 1644, où il fut enterré le 17 février :
Il vécut à Amsterdam, puis en 1627 à Leyde et à Haarlem. Il eut dans cette ville un procès scandaleux. Arrêté en 1627, il fut accusé d'être à la tête de la Secte des rose-Croix, à laquelle on attribuait des doctrines dangereuses et des moeurs contre nature. Torrentius, malgré la torture, ne fit pas d'aveux, mais des témoignages écrasants se produisirent contre lui. On l'accusait aussi d'avoir voulu corrompre sa femme. Il fut condamné malgré la prot0ection du prince Fréféric Henry, à être brûlé. Sa peine fut commuée en vongt ans de prison. grâce à l'intercession de l'ambassadeur anglais sir DudleyCcarleton il fut mis en liberté en 1630 et son protecteur l'emmena à Londres, mais il semble y avoir eu peu de succès. Il avait épousé Cornélia Van campen, qui pendant son procès s'établit à Amersfoot. Il revint bientôt de Londres à Amsterdam, subit un second procès, fut une seconde fois mit question et mourut des suites de la torture. Il eut pour élève P.F. Duifhuyzen. Deux de ses ouvrages figuraient dans la collection de Charles I. On dit qu'il avait beaucoup de talent. Le Musée National d'Amsterdam conserve de lui une Nature morte.
Source : Dictionnaire critique et documentaire des peintres sculpteurs dessinateurs et graveurs / Emmanel Bénézit.
La notice du tableau "La nature morte avec bride" du Rijksumseum transcrit le texte se trouvant sur la partition et témoigne de l'invention du peintre puisqu'il est écrit : "ce qui est hors de mesure, périt dans un mal incommensurable".
Par ailleurs lorsque l'on retranscrit la partition soit pour la première partie sol mi do do do fa ré ré et que l'on interroge une application de reconnaissance musicale, on ne trouve aucune correspondance et il est fort possible que le morceau découle de l'imaginaire de l'artiste.
Le blog d'un.E internaute propose une description succincte du tableau et dans Nature morte avec bride et mors suivi de Apocryphes, Zbigniew Herbert livre son interprétation de la peinture.
Concernant votre dernière question, la notice sur "Jeronimus Cornelisz" publié sur wikipedia est assez complète et mentionne :
Bien que cela n'ait jamais été établi, il est vraisemblable que Jeronimus ait été en contact à cette période avec le peintre controversé Johannes van der Beeck (Torrentius), un autre résident de Haarlem. Torrentius était un libertin notoire qui fût jugé et condamné en 1627 pour immoralité, hérésie et satanisme. Que Cornelisz fût ou non un proche de Torrentius, qu'il partageât ou pas ses vues hétérodoxes, il est avéré qu'il quitta Haarlem dans les semaines suivant la fin du procès du peintre, pour se rendre à Amsterdam et se mettre au service de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (VOC). Il obtint le poste de négociant en second sur un nouveau navire, le Batavia, en partance pour Java et les Indes orientales dès .
(...)
Les motivations de Cornelisz ont été l'objet de nombreuses spéculations. Ses contemporains l'ont cru contaminé par les vues hérétiques du peintre Torrentius, et il a été suggéré par la suite que ses actes sur l'île étaient le reflet de croyances anabaptistes révolutionnaires. Les témoignages qui sont parvenus jusqu'à nous permettent cependant de penser que, quelles qu'aient été ses croyances religieuses, le comportement de Jeronimus Cornelisz était certainement le fait de tendances psychopathes.
La lecture des ouvrages Les naufragés du "Batavia" ; suivi de "Prosper" et de Livres L'archipel des hérétiques : la terrifiante histoire des naufragés du "Batavia" vous permettra d'approfondir cette question.
Pour finir, Torrentius a intrigué plus d'un chercheur, expliquant les nombreuses études qui lui ont été consacrées. Aussi, si vous souhaitez en savoir plus sur ce personnage, il vous faudra parcourir :
Ouvrages
- Nature morte avec bride et mors suivi de Apocryphes / Zbigniew Herbert ; trad. du polonais Thérèse Douchy
- Een Haarlems-Amsterdamse duivelskunstenaar: de schilder en vrijdenker Johannes Torrentius 1588 - 1644 / Wim Cerutti, 2014.
- Torrentius / A.J. Rehorst, 1939
- Johannes Torrentius, Schilder, 1589-1644 / A. Bredius, 1909.
Articles
- Philipp, Michael, "Een recht natuerlijke Schildery": Johannes Torrentius, die Camera obscura und der Augentrug in der niederländischen Malerei des 17. Jahrhunderts In: Täuschend echt, 2010, p. 30-39.
- Brown, Christopher, "The strange case of Jan Torrentius: art, sex, and heresy in seventeenth-century Haarlem", in, Rembrandt, Rubens and the art of their time, 2017, p. 224-233.
- White, Christopher, "An undescribed lost picture by Jan Torrentius", In: Essays in Northern European art, 1983, p. 297-298.
- Jan Gerrit van Gelder, "Johannes Torrentius (1589 - 1644)", Oud-Holland, 57, 1940, p. 140-142.
- Lionel Cust, "Johannes Torrentius", 1915, The Burlington magazine for connoisseurs, 27.1915, 248-251.
et pourquoi pas le roman De Colin Thibert, Torrentius.
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