Question d'origine :
S.V.P. Si on mentionne souvent, dans les statistiques démographiques françaises, la notion de Baby boom, qui a eue lieue après la deuxième guerre mondiale; Ce phénomène, d'une augmentation très importante des naissances durant cette période, a t il été observé, en particulier dans les pays voisins , et plus particulièrement dans ceux ayant connu aussi la guerre et les privations qui ont suivies ? Et avec quelle intensité ? merci
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 04/03/2021 à 10h50
Bonjour,
" La plupart des pays industrialisés ont connu un fort boom de la fécondité entre le milieu des années 40 et celui des années 60, qualifié plus tard de baby-boom."
Il s'agit d'un phénomène encore mal expliqué par les démographes qui nous est présenté ici par Maks BANENS, démographe, maître de conférences et chercheur dans les domaines de la famille, du couple, des relations intergénérationnelles au laboratoire Mondes et dynamiques des sociétés (MODYS, université Lyon-II), dans un article publié dans Alternatives économiques n°181 : Baby-boom : la surprise démographique :
" Tout commence au début des années 40. Au beau milieu de la Seconde Guerre mondiale, la fécondité se met tout d’un coup à grimper dans l’ensemble des pays occidentaux, qu’ils soient neutres ou belligérants. En France, le nombre de naissances passe de 522 000 en 1941 à 575 000 en 1942 et 615 000 en 1943. Avec la paix, la natalité monte bien plus encore, notamment dans les pays vainqueurs les plus épargnés. Aux Etats-Unis comme en France, l’indicateur conjoncturel de fécondité passe de deux à trois enfants entre la fin des années 30 et 1946. D’où ce terme de boom.
Au départ, ce phénomène est perçu comme un simple rattrapage des naissances qui n’ont pas eu lieu pendant la crise des années 30 ou la guerre. Un tel comportement avait déjà été constaté après la Première Guerre mondiale : les couples qui avaient reporté les naissances rattrapaient ce retard dès le retour de la paix. 840 000 bébés naissent ainsi en France en 1920, contre 410 000 en 1917. Dès 1922, tout était rentré dans l’ordre.
Durant l’entre-deux-guerres, dans la majorité des pays industrialisés, la tendance est déjà à la maîtrise de la fécondité, liée à de multiples facteurs : la hausse de l’espérance de vie, la construction progressive de systèmes de protection sociale, mais aussi l’urbanisation, la déchristianisation et la scolarisation. Ces pays entrent dans la dernière phase du processus que les démographes appellent transition démographique, qui voit toutes les sociétés passer, à des rythmes différents, à des niveaux de natalité et de mortalité faibles.
Au milieu des années 30, les régimes totalitaires - l’Italie de Mussolini et l’Allemagne de Hitler en tête - prennent des mesures autoritaires pour stimuler la natalité. En France, un nouveau Code de la Famille est voté en 1939, qui sera appliqué par Vichy, puis confirmé par De Gaulle. Un nouvel institut de recherche, l’Institut national d’études démographiques (Ined), voit le jour pour suivre les résultats de la nouvelle politique nataliste. En son sein, Alfred Sauvy lance dès 1946 une enquête auprès de ses confrères européens et américains, afin de sonder leur foi dans le renouveau de la natalité. La conclusion semble irrévocable : " Due, pour une large part, à des facteurs temporaires ou accidentels, la reprise de la natalité doit cesser et le mouvement de déclin doit reprendre ". Il faudra attendre dix ans de plus pour que les démographes et la société tout entière, prennent conscience qu’une reprise importante et durable de la natalité a lieu.
Le baby-boom ne touche pas l’ensemble de la planète. La majorité des pays en voie de développement se trouvent encore, au milieu du XXe siècle, dans une situation de natalité quasi maximale, au tout début du processus de transition. Même en Europe, certains pays sont en retard en matière de maîtrise de la natalité, telles l’Italie et l’Espagne, ce qui rend la perception d’une reprise conjoncturelle plus difficile. L’Europe de l’Est et les pays vaincus ne participent guère au baby-boom : certains ont d’ailleurs connu leur boom au cours des années 30, comme l’Allemagne pendant le Reich triomphant.
La reprise de la fécondité d’après-guerre demeure avant tout un phénomène des pays développés vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale. Le Canada et les États-Unis en sont les représentants les plus purs, suivis par l’Australie. La France fait partie des pays où le baby-boom est net, quoiqu’en retrait par rapport aux pays précédents. Le Royaume-Uni, curieusement, reste encore plus en retrait : les années 1946-1947 exceptées, le taux de natalité anglais reste faible jusqu’aux années 60. Ensuite, le pays se raccroche au boom finissant en Europe (voir encadré).
Le baby-boom prend fin aussi brusquement qu’il a démarré. Dans tous les pays concernés, au milieu des années 60, la fécondité revient à son niveau des années 30. Moins de dix ans plus tard, la fécondité conjoncturelle est souvent passée au-dessous de deux enfants par femme. Certains y voient alors un " baby-krach ".
Nous vous laissons prendre connaissance de la fin de cet article qui tente d'apporter quelques réponses à ce phénomène mal expliqué.
Pour aller plus loin et connaître en détail la situation des autres pays européens, vous pouvez consulter ces documents :
- Démographie contemporaine de l'Europe : évolutions, tendances, défis / Alain Monnier auxpages 58 à 66
- Précis d'histoire européenne : du 19e siècle à nos jours / Jean-Charles Asselain, Pierre Delfaud, Pierre Guillaume... [et al.] auxpages 386 à 388
- Histoire des populations de l'Europe. III, : Les temps incertains 1914-1998 / sous la direction de Jean-Pierre Bardet et Jacques Dupâquier
Bonne journée.
" La plupart des pays industrialisés ont connu un fort boom de la fécondité entre le milieu des années 40 et celui des années 60, qualifié plus tard de baby-boom."
Il s'agit d'un phénomène encore mal expliqué par les démographes qui nous est présenté ici par Maks BANENS, démographe, maître de conférences et chercheur dans les domaines de la famille, du couple, des relations intergénérationnelles au laboratoire Mondes et dynamiques des sociétés (MODYS, université Lyon-II), dans un article publié dans Alternatives économiques n°181 : Baby-boom : la surprise démographique :
" Tout commence au début des années 40. Au beau milieu de la Seconde Guerre mondiale, la fécondité se met tout d’un coup à grimper dans l’ensemble des pays occidentaux, qu’ils soient neutres ou belligérants. En France, le nombre de naissances passe de 522 000 en 1941 à 575 000 en 1942 et 615 000 en 1943. Avec la paix, la natalité monte bien plus encore, notamment dans les pays vainqueurs les plus épargnés. Aux Etats-Unis comme en France, l’indicateur conjoncturel de fécondité passe de deux à trois enfants entre la fin des années 30 et 1946. D’où ce terme de boom.
Au départ, ce phénomène est perçu comme un simple rattrapage des naissances qui n’ont pas eu lieu pendant la crise des années 30 ou la guerre. Un tel comportement avait déjà été constaté après la Première Guerre mondiale : les couples qui avaient reporté les naissances rattrapaient ce retard dès le retour de la paix. 840 000 bébés naissent ainsi en France en 1920, contre 410 000 en 1917. Dès 1922, tout était rentré dans l’ordre.
Durant l’entre-deux-guerres, dans la majorité des pays industrialisés, la tendance est déjà à la maîtrise de la fécondité, liée à de multiples facteurs : la hausse de l’espérance de vie, la construction progressive de systèmes de protection sociale, mais aussi l’urbanisation, la déchristianisation et la scolarisation. Ces pays entrent dans la dernière phase du processus que les démographes appellent transition démographique, qui voit toutes les sociétés passer, à des rythmes différents, à des niveaux de natalité et de mortalité faibles.
Au milieu des années 30, les régimes totalitaires - l’Italie de Mussolini et l’Allemagne de Hitler en tête - prennent des mesures autoritaires pour stimuler la natalité. En France, un nouveau Code de la Famille est voté en 1939, qui sera appliqué par Vichy, puis confirmé par De Gaulle. Un nouvel institut de recherche, l’Institut national d’études démographiques (Ined), voit le jour pour suivre les résultats de la nouvelle politique nataliste. En son sein, Alfred Sauvy lance dès 1946 une enquête auprès de ses confrères européens et américains, afin de sonder leur foi dans le renouveau de la natalité. La conclusion semble irrévocable : " Due, pour une large part, à des facteurs temporaires ou accidentels, la reprise de la natalité doit cesser et le mouvement de déclin doit reprendre ". Il faudra attendre dix ans de plus pour que les démographes et la société tout entière, prennent conscience qu’une reprise importante et durable de la natalité a lieu.
Le baby-boom prend fin aussi brusquement qu’il a démarré. Dans tous les pays concernés, au milieu des années 60, la fécondité revient à son niveau des années 30. Moins de dix ans plus tard, la fécondité conjoncturelle est souvent passée au-dessous de deux enfants par femme. Certains y voient alors un " baby-krach ".
Nous vous laissons prendre connaissance de la fin de cet article qui tente d'apporter quelques réponses à ce phénomène mal expliqué.
Pour aller plus loin et connaître en détail la situation des autres pays européens, vous pouvez consulter ces documents :
- Démographie contemporaine de l'Europe : évolutions, tendances, défis / Alain Monnier aux
- Précis d'histoire européenne : du 19e siècle à nos jours / Jean-Charles Asselain, Pierre Delfaud, Pierre Guillaume... [et al.] aux
- Histoire des populations de l'Europe. III, : Les temps incertains 1914-1998 / sous la direction de Jean-Pierre Bardet et Jacques Dupâquier
Bonne journée.
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